En examinant le tableau du mouvement de la population, on constate que, pendant la première période décennale du siècle, le nombre des naissances est à peu près égal à celui des décès, et qu’il reste stationnaire jusqu’en 1860, sauf une augmentation d’environ 1/6, qui se produit de 1830 à 1839 mais n’est que passagère et ne tarde pas à disparaître.
Pendant la même période, exception faite d’une augmentation momentanée, qui se produit en même temps que celle des naissances, qui était en faveur des dernières atteint, en 1869, le chiffre de 71 en faveur des premiers.
Cet écart s’accentue pendant les trente dernières années, et, en 1898, alors que le nombre des naissances de la dernière période décennale n’est plus que de 155, celui des décès est encore de 242 ; ce qui est une des principales causes du décroissement de la population.
Cette progression de l’écart entre les décès et les naissances a pour cause le mouvement d’émigration des jeunes gens vers les villes, qui a commencé à se produire au milieu du siècle. Ces jeunes gens se mariant au pays et le quittant avec leur femme pour n’y revenir que longtemps après, il ne reste guère que ceux que l’âge retient, or, il ne faut pas aller chercher les sources de la vie chez ceux qui sont sur le point de la quitter.
L’examen du tableau des décès nous montre que la durée de la vie humaine n’est que de 30 ans au commencement du siècle. Cette brièveté de l’existence est attribuable à la mortalité des enfants qui est de 14 sur 25 décès en 1800 ; mortalité due à l’ignorance et aux pratiques superstitieuses des mères, et qui va en décroissant à mesure que l’intelligence s’éclaire.
Une autre cause est l’état sanitaire des habitations qui laissait fort à désirer : il n’était en effet guère de villages au milieu desquels on ne vit une mare dont l’eau croupissante dégageait des miasmes qui empestaient l’air.
De 1800 à 1850, elle décroît, mais d’une manière moins sensible, jusqu’en 1898 ou elle est de 46 ans, après avoir été de 48 en 1875.
On peut attribuer en partie cette réduction de l’existence à l’amour excessif du bien-être, qui enlève à l’homme sa vigueur en même temps que son énergie ; mais surtout à l’abus de l’alcool, qui a fait, dans nos campagnes, de rapides progrès depuis l’extension qu’y a prise l’industrie de la distillation des cidres et poirés.
Autrefois, quand l’alcool était considéré comme un produit pharmaceutique, on y rencontrait de nombreux cas de longévité. Les registres de l’état civil mentionnent que :
1) Michel Le Monnier mourut subitement de 20 octobre 1609, à l’âge de 105 ans,
2) Marie Saint-Ellier, de la Corbinière mourut en 1857, le 17 janvier, à l’âge de 102 ans,
3) Mahérault de la Rosière, mourut le 20 août 1851 à l’âge de 98 ans,
4) Poirier François, médaillé de Ste Hélène, est mort le 26 juin 1882, à l’âge de 98 ans.
Aujourd’hui, les octogénaires même deviennent de plus en plus rares.
Le genre de vie, qui était autrefois des plus simples, s’est profondément modifié depuis vingt-cinq ans surtout, tant au point de vue de la nourriture qu’à celui du vêtement.
Dans la première moitié du siècle, la nourriture se composait de pain noir, fait le plus souvent avec du seigle ou du sarrasin, de lard, de laitage et de fruits, à l’exclusion même de la légendaire poule au pot du dimanche. Aujourd’hui, le pain blanc est d’un usage général, et il n’est guère de familles dont le principal repas ne se compose de viande de boucherie et ne soit complété par une indispensable tasse de café.
Il en est de même de l’habillement. Fait autrefois d’une étoffe grossière, mais solide, que fabriquaient les tisserands du pays, il est aujourd’hui presque aussi soigné que celui de l’ouvrier des villes, sauf en ce qui concerne la forme, car la blouse tient encore le premier rang.
Il n’est pas jusqu’à l’habitation qui ne se soit améliorée ; presque toutes les maisons du bourg principalement ont été reconstruites ou restaurées depuis moins de cinquante ans.
La propriété étant très divisée ; il existe beaucoup de petites terres de 2 à 56 hectares. Pendant un certain temps, tandis que le propriétaire émigrait pour se livrer à l’exercice d’une profession, la femme et les enfants les cultivaient. Mais cette situation présentait de graves inconvénients au point de vue des mœurs ; elle finit par cesser ; la femme suivit le mari, et alors des propriétaires et des fermiers prirent en location et réunirent a la leur une ou plusieurs de ces petites exploitations, dont le nombre se restreignit au profit des plus grandes.
Les propriétaires et les fermiers de terres d’une certaine importance, les exploitent avec l’aide de domestiques qui, pour la plupart, sont étrangers à la commune. Ceux dont les terres ont peu d’étendue sont aidés par les journaliers, qui deviennent de plus en plus rares et sont presque tous d’ancien fermiers que les causes différentes ont obligés a cesser leur exploitation.
Le montant des gages des domestiques varie de280 à 320F, selon leur âge et leurs aptitudes. Le salaire des journaliers est de 1F75 en hiver et 2F25 en été, non compris la nourriture. La durée moyenne du travail quotidien est de 10 heures.
L’industrie n’occupe qu’un très petit nombre d’ouvriers ; leur salaire varie de 2F50 à 3F, et la durée du travail pour eux est également de 10 heures.
Le commerce se fait exclusivement par les patrons et leur famille. Une seule maison occupe 6 employés dont le salaire est de 1 à 2F, pour ceux qui sont nourris à la maison, et de 3 à 5F, pour les autres.
L’instruction, qui, dans la première partie du siècle, était très négligée, s’est développée dans la seconde ; et, aujourd’hui, sans avoir atteint un haut degré, elle donne des résultats satisfaisants. Presque tous les parents comprennent son importance et aucun ne refuse d’envoyer ses enfants en classe ; cependant il en est encore un certain nombre qui n’attache pas une importance suffisante à la régularité de la fréquentation dont la moyenne est à peine de 9 mois.
Le nombre des illettrés, d’après les tableaux de recensement des jeunes gens, est de 4%.